Le
Béninois se méfie du Béninois: La béninoiserie ou quand la
jalousie est un frein culturel au développement
(BeninInfo.com
03/09/2004)
Médisance, croc en jambe, coup
bas, sorcellerie ou même élimination physique, la béninoiserie
est un véritable phénomène de société au Bénin. Forme
paroxysmique de la jalousie, elle consiste à faire tout son
possible pour empêcher un tiers d’évoluer. Un travers qui
expliquerait notamment la discrétion et le manque de
solidarité de la diaspora béninoise.
« A l’étranger : un Béninois + un Béninois = zéro. Et
un Béninois + un Béninois, à l’intérieur du Bénin = -1.
» C’est avec cette formule inspirée qu’un responsable béninois
de la Junior Achievement, une organisation internationale
d’apprentissage à l’entrepreunariat et au leadership
avait symbolisé ce que beaucoup de monde au Bénin désigne
sous le nom de béninoiserie. Une jalousie, endogène à la
société, qui conduit à tout faire pour mettre des bâtons
dans les roues de ceux qui souhaitent avancer. Un phénomène,
certes, partout présent en Afrique dirons certains, mais qui
semble prendre une autre dimension chez les Béninois. Il
expliquerait même pourquoi la diaspora nationale avancerait
en rang si dispersé : chacun pour soi et Dieu pour tous.
« C’est un trait de caractère particulier au Béninois,
explique Mireille, 30 ans, attachée commerciale à Cotonou.
Il fait tout pour ramener la personne qui essaie de monter à
son propre niveau et même plus bas, au lieu de se battre et
d’économiser son énergie pour monter lui-même. Il est
capable de mentir, de tuer, de jeter des sorts, bref, faire
tout ce qui est humainement et inhumainement possible de faire
pour arriver à ses fins. »
La béninoiserie, un terme né il y a 14 ans
« La béninoiserie est un terme qui est apparu après la conférence
nationale (février 1990, ndlr) », rappelle Mireille. Une
date à laquelle sursoit Sessi, journaliste à Cotonou. Et
d’y aller de sa propre définition : « L’adage
‘L’union fait la force’ n’est pas de mise dans le
concept de béninoiserie. C’est chacun pour soi, dans son
coin et dans l’ombre. Le fait est que le Béninois veut être
au centre de tout. ‘Si ce n’est pas moi, ça ne marche
pas. Si c’est l’autre, c’est mauvais’ . Alors il voit
en l’autre un ennemi au lieu d’une force positive sur
laquelle il peut compter ».
« ‘‘Dieu demande à un Béninois : ‘Demande moi ce que
tu veux mais ton voisin aura le double.’ L’homme réfléchit
et se dit : ‘Si je demande 10 millions, l’autre aura 20
millions...Pas question !’ Après mures réflexions il finit
par demander à Dieu de lui crever un œil.’’ Ça c’est
le Béninois typique », explique Mireille qui rapporte cette
blague actuellement en vogue à Cotonou.
« Ce sont des choses qui freinent le pays », estime
l’artiste zouk béninois Richard Flash, qui a dédié une
chanson au phénomène dans son dernier album Zê-Kémi. Il précise
qu’il ne l’a pas fait pour dénoncer le phénomène, mais
plutôt pour sensibiliser ses concitoyens à cet état
d’esprit néfaste. Les exemples de béninoiserie sont légion,
et ce à tous les échelons de la société. « Dans une
administration, un chef de service éconduit par une employée
qu’il courtisait peut tout simplement bloquer les ordres de
mission pour l’empêcher de partir, alors qu’il sait que
ce sont les indemnités de voyage qui arrondissement les fins
de mois chez les fonctionnaires. Ni lui, ni personne ne
partira à la place », raconte Mireille.
Sorcellerie
De la simple méchanceté, la béninoiserie peut aller
jusqu’au meurtre, par empoissonnement, et aux attaques
mystiques. « Au lieu de travailler pour être au même niveau
que l’autre, certains vont chez un féticheur pour vous
couper le souffle », explique Richard Flash. « Les attaques
occultes sont monnaie courante, renchérit Sessi. On vous nuit
par la sorcellerie. On peut vous enlever votre lucidité par
exemple ou même tout simplement se débarrasser de vous. Et
ils essayent. Le tout est après de savoir si votre force
protectrice va au-delà de leur force de nuisance. »
Comment se protéger ? « Par la prière », avoue Mireille.
« Et puis j’essaie de me faire la plus discrète possible
pour qu’on ne pense pas à moi. D’autres vont se tourner
vers les forces occultes, mais ça finit toujours par se
retourner contre eux ». « Je me sais exposé, reconnaît
Richard Flash, mais quand tu vas chez un féticheur, ce même
féticheur est capable de t’emprisonner, de t’utiliser
pour faire briller sa propre étoile. Certains estiment
qu’il faut faire confiance à Dieu, mais pour cela il faut
avoir une vraie foi. Pour ma part, je fais très attention.
Les proches sont les plus dangereux. J’ai plutôt peur de
mes amis que de mes ennemis. Car mes ennemis ne connaissent
pas mes faiblesses et ne peuvent pas m’atteindre. »
Craintes de la diaspora
« Il y a trois millions de Béninois de l’extérieur. Il y
en a plein qui ne reviennent pas au pays parce qu’ils ont
peur de ça. Qu’on leur nuise ou qu’on veuille les mettre
à terre. Ils se disent qu’ils sont à l’abris à l’étranger,
et ils ont raison. Moi si j’ai l’opportunité de partir,
je pars », analyse Mireille. « La solution idoine contre la
béninoiserie est de vivre caché. La diaspora béninoise
dispose d’un énorme potentiel économique pour développer
le pays, mais personne ne le fait à cause justement de cette
méfiance qu’elle entretient à l’égard des siens »,
poursuit Sessi.
Mais la béninoiserie n’est pas un phénomène exclusivement
national. Il s’exporte à travers la diaspora. « A l’extérieur,
un Béninois en poste qui voit arriver un autre Béninois le
verra comme un élément gênant qu’il faut éliminer. Il
n’hésitera pas à médire de lui, à le disqualifier auprès
de la hiérarchie, même si c’est un bon élément. Ici
comme ailleurs, la béninoiserie entraîne la promotion des médiocres
», commente Sessi, qui affirme se moquer de tout ça et être
prêt à dénoncer ouvertement ce problème. « Qu’on me
laisse avancer, c’est tout ! ».
Aucun membre de la classe politique n’a, jusque-là, jeté
un pavé dans la marre. Les initiatives d’Etat entreprises
pour courtiser la diaspora et sa puissance économique n’ont
absolument pas pris en compte un élément qui paraît
pourtant central dans la culture du pays. Les racines de la désaffection
des Béninois de l’extérieur à l’égard de leur patrie
se cachent sans doute en partie dans cette béninoiserie que
les décideurs semblent négliger. Rétablir la confiance
entre tous les enfants du Bénin est un travail de longue
haleine nécessaire pour bâtir le socle d’une nation unie
et prospère. A chacun donc de balayer devant sa porte et de
faire un pas vers l’autre.
jeudi 2 septembre 2004, par David Cadasse - AFRIK.com
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Vu
la misère grandissante de nos populations des villes et des campagnes, il est
temps que nous gérions autrement notre pays et ce serait à cette condition
uniquement que nous éviterons de nous installer durablement dans la boue de
l'indigence ou pour faire simple dans le sous développement. Selon
l'indice de développement humain du programme des Nations unies datant de cette
année , le taux de pauvreté du Bénin est passé de 37% en 2001 à 51% en
2005. Le dimanche 16 octobre à Lyon, Maître Adrien Houngbédji s'étonnait, et
moi avec lui, du fait qu'en l'espace de dix ans, le Bénin a reçu 1.500
milliards de F CFA au titre de l'aide au développement sans que cela ne se
traduise de façon remarquable par une amélioration des conditions de vie des béninoises
et des béninois. Entre autres facteurs qui freinent le développement de notre
pays je puis citer la corruption et la "béninoiserie".Au Bénin la
corruption a cours dans tous les secteurs de la vie, même
dans ceux sensibles tels que l'éducation (Exemple :
Organiser en tant qu'enseignant un concours de bourse où il n'y avait
qu'une place à pourvoir, et retenir son neveu alors que ce dernier ne réunit
pas les conditions requises...), la santé, la sécurité, etc. Ainsi tous
les secteurs d'activités sont pris en otage par quelques individus qui
s'offrent impunément, un "Maximum
social particulier" au lieu d'œuvrer à donner à tous un
"Minimum Social Commun". L'autre fléau qui constitue
un frein à notre développement est la "béninoiserie". Elle
constitue malheureusement pour la corruption un terreau très fertile. Je
puis définir la "Béninoiserie"
comme étant l'usage par un béninois de tous les moyens et comportements nécessaires
pour maintenir son compatriote ou toute personne de nationalité étrangère
dans une position inférieure ou tout simplement dans la misère ordinaire (Exemples :
1- Empêcher un Etudiant de soutenir son Mémoire d'étude
parce que ce dernier veut aller poursuivre ses études à l'étranger... 2- Démissionner
ses collaborateurs, les vilipender sans raisons parce qu'on ne tolère pas la
contradiction fut- elle idéologique... Celui qui use de cette
arme redoutable est généralement animé par le souci de
s'accomplir tout seul au détriment de tous ceux avec qui il est en relation.
Cette "Béninoiserie" fait qu'il ramène tout à lui et à ses
proches. Au niveau politique cela se traduit par la marginalisation du bas
peuple. Je pense très profondément que la "Béninoiserie" ne
saurait permettre l'éclosion d'une quelconque culture de développement partagé.
Or ce qu'il nous faut aujourd'hui c'est un développement
largement partagé qui donne à tous des chances de vivre décemment.
Par
Mikaïla KASSOUMOU, Site Web: www.mikaila.info
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